Les vertus de la diversité
Article de Gérard Haddad
Notre ami Gérard Haddad s'est rendu l'hiver dernier dans son pays natal, la Tunisie, durant une période troublée et pleine d'interrogations. Il a publié dans la revue hebdomadaire"Réalités de Tunisie" l'article ci-après qui est un vibrant plaidoyer pour la diversité.
Chaque pays possède ses particularités et son histoire, ce qui ne l’empêche pas, à l’occasion, de tirer quelque enseignement de l’expérience des autres nations.
Prenons comme exemple le cas de l’Inde. C’est une des principales puissances émergentes du monde actuel. Le pays connaît depuis des années des taux de croissance exceptionnels, il possède de grandes Universités et occupe dans le domaine de l’informatique une place privilégiée. Sans parler de sa littérature et de ses arts. Une future super puissance.
Ce pays, d’un milliard trois cents millions d’habitants, est né du schisme sur des bases religieuses, malgré les efforts de Gandhi, de l’ancien empire des Indes Britanniques entre l’Inde actuelle à majorité hindouiste et le Pakistan, bientôt divisé lui-même en Pakistan et Bengla Desh musulmans.
L’Inde compte néanmoins aujourd’hui 140 millions de musulmans, et son Président de la République lui-même est de cette confession. Quant au Pakistan, n’y réside plus qu’à peine 2% d’hindouistes. Les autres ont été chassés.
Nous avons d’un côté un immense pays en voie de développement rapide, une démocratie modèle jouissant d’une bonne stabilité malgré l’ampleur de ses problèmes. De l’autre, un pays en crise permanente, instable, pauvre, où les attentats sanglants sont fréquents. Pourtant, le premier, l’Inde, est extrêmement hétérogène sur le plan religieux. Le second, le Pakistan, est religieusement homogène.
Quelle leçon en tirer ? Celle que l’on peut tirer de bien d’autres situations historiques. Les pays qui réussissent, où se développent sciences et industrie, sont des pays hétérogènes, où la variété des ethnies favorise développement et progrès.
Aussi paradoxal que cela paraisse, les pays religieusement homogènes sont souvent instables, peu créatifs sur le plan des sciences et des arts, le ferment que constituent les minorités ayant disparu.
Par quel malheur de l’histoire les pays arabo-musulmans, qui furent dans le passé hospitaliers et ouverts, ne semblent plus pouvoir supporter la différence religieuse depuis que le virus du nationalisme les a frappés?
L’idée « on est si bien quand on est entre nous » se révèle à l’usage source de retard économique, d’instabilité, voire de destruction. Cette leçon ne mériterait-elle pas d’être méditée par notre Tunisie en mutation ?
Gérard Haddad
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